Guerre de la vérité et souveraineté numérique

Guerre économique

La guerre commerciale déclenchée par le personnage Trump le 1er février 2025 agit comme un électrochoc pour les pays alliés des États-Unis, dont nous faisons partie. Cette offensive marque un pas décisif vers une reconfiguration de l’économie à l’échelle planétaire.

Dans son livre La stratégie du choc (2007), la journaliste et essayiste Naomi Klein montrait que des crises (subies ou provoquées) servent souvent de leviers à des intérêts politiques et économiques pour faire passer des réformes d’ampleur. Maintenir un chaos permanent permet alors de désorienter l’État et de l’orienter vers des politiques néolibérales de déréglementation, de privatisation et de réduction du rôle de l’État.

Le personnage Trump cherche ainsi à entretenir une forme de « révolution » permanente, produisant un climat d’incertitude continue, monopolisant l’attention médiatique et publique, négociant pour l’emporter et prônant la paix par la guerre.

Guerre de la vérité

La guerre la plus déterminante que nous traversons est celle de la vérité : celle des faits, des scientifiques, des penseurs, des visionnaires, des lucides. Dans les dictatures, l’information est censurée, l’éducation interdite et les libertés bafouées. Dans les démocraties, on a recours à la désinformation au moyen de « faits alternatifs » (alternate fact), d’opinions fortes (strong opinion) et de demi-vérités. Les citoyens sont segmentés par catégories, par souffrance, par ambition, pour les satisfaire, obtenir leur adhésion ou les endormir.

Le personnage Trump, comme d’autres influenceurs étatiques, veut faire dévier les sociétés de manière radicale et unilatérale. Au fond, il espère vraisemblablement que son héritage soit quasi-monarchique et qu’il laisse son nom dans les grands moments de l’histoire de l’humanité. Tous les moyens lui semblent bons pour y parvenir, et particulièrement le mensonge.

Technologie et prolifération du mensonge

Les technologies numériques de l’information et de la communication sont désormais au cœur de nos existences, qui deviennent plus artificielles et plus émotionnelles que jamais. L’ordinateur dans notre poche ou notre sac, avec ses applications et leurs algorithmes, nous relie aux autres, nous informes, nous libère de la contrainte du temps et de l’espace, nous offre des solutions et une expérience personnalisée en quelques clics.

Toutefois, il peut aussi nous isoler, nous conditionner, nous traquer, nous enfermer dans des chambres d’écho (des profils d’utilisateurs qui nous ressemblent), récupérer des données massives pour mieux nous influencer. C’est là qu’apparaît le risque de s’enfermer dans une « vérité alternative » que partage notre réseau. L’effet démultiplicateur des réseaux sociaux est incontestable, et la popularité d’un message nourrie par les « likes » illustre bien notre société du paraître, motivé par la volonté d’orienter l’opinion des autres.

Avec les outils de l’intelligence artificielle, les informations nouvelles sont produites, diffusées et repartagées encore plus rapidement. Les hypertrucages (deepfakes) se développent déjà à vive allure. Les systèmes d’IA créent en quelques instants une vidéo crédible d’une personne avec une voix similaire et un texte généré automatique ou intentionnellement transformé.

Le plus récent rapport de l’organisme Horizons de politiques Canada (2024) prédit que, sous peu, les individus ne sauront plus distinguer le vrai du faux. On y lit : « Des outils d’IA génératifs plus puissants, le déclin de la confiance dans les sources de connaissances traditionnelles et des algorithmes conçus pour susciter l’engagement émotionnel plutôt que des rapports factuels pourrait accroître la méfiance et la fragmentation sociale. Un plus grand nombre de personnes pourraient vivre dans des réalités distinctes, façonnées par leurs médias personnalisés et leurs écosystèmes d’information. »[1] Cette désinformation engendre déjà une crise de confiance envers l’information, le savoir, nos institutions et nos relations sociales.

Ce phénomène était déjà décrit par Alvin Toffler (1929-2016), futurologue et sociologue américain, dans son ouvrage Le choc du futur (1970) : il y évoquait une probable hausse du stress psychologique et social provoquée par l’accélération du changement. Sa thèse soutenait que les progrès technologiques provoqueraient une surcharge informationnelle pour tous, une désorientation sociale pour les individus et les institutions, ainsi qu’une obsolescence accélérée des objets, des compétences et des relations humaines.

Le projet de souveraineté du Québec

Nous voilà donc plongés dans un état de guerre, malgré notre nature pacifique. Cela pourrait être l’étincelle qui nous incite à collaborer en tant que citoyens, malgré nos divergences politiques. L’occasion se présente de concilier deux valeurs essentielles, la justice et la liberté, ces deux points de fuite qui polarisent gauche et droite. Face à l’adversité, l’idée d’un Québec souverain pourrait se consolider, comme un moyen de se défendre. C’est aussi, heureusement, un retour du balancier vers plus d’universalisme. Celui-ci était moins mobilisateur en temps de paix, mais il peut désormais nous unifier pour résister, en prenant de la distance avec le communautarisme canadien. Notre culture commune, centrée sur la langue française et la laïcité de l’État, agit comme un rempart contre les dogmatismes qui s’insinuent dans nos démocraties.

Vers la souveraineté numérique

Les GAFAM sont déjà solidement ancrés dans nos vies personnelles et professionnelles partout en Occident et règnent dans nos administrations publiques. De l’autre côté du globe en Asie, d’autres grands acteurs technologiques, soutenus par des pouvoirs étatiques et politiques, poursuivent les mêmes ambitions.

Aujourd’hui, la gouvernance de l’infrastructure numérique de notre État est faible. Les piliers de notre société, de plus en plus numérisée, se trouvent à l’extérieur de nos frontières et de notre contrôle. Nous utilisons l’infonuagique (cloud) centralisée, souvent hébergée dans des centres de données privés et extraterritoriaux, tandis que nos systèmes d’identités numériques sont gérés par des institutions financières et bientôt par les prochains géants technologiques.

La guerre commerciale orchestrée par le personnage Trump passera sans doute par une mainmise sur les GAFAM, menant à la captation de nos données, au filtrage de nos communications, à la manipulation de l’opinion publique et, ultimement, au blocage de l’accès aux services en ligne de l’État québécois, ainsi qu’à ceux dont disposent les citoyens et les consommateurs. Nous sommes entrés dans un scénario proche du rançongiciel étatique (ransomware), une forme d’extorsion alimentée par le personnage Trump.

Il devient donc impératif de prendre notre destinée numérique en main, en adoptant des mesures fortes et cohérentes pour maîtriser nos infrastructures technologiques, protéger nos données et renforcer notre littératie numérique. Cela s’avère essentiel pour assurer notre résilience économique, préserver notre identité culturelle et défendre les droits fondamentaux des citoyens.

Notes :

Édition du texte : Utilisation de ChatGPT pour la recherche (synthèse de publications d’auteur) et pour la reformulation (amélioration du style). OpenAI. (2025). ChatGPT o1 (version du 2 février) [grand modèle multimodal]. https://chatgpt.com

Source de l’image : OpenAI. (2025). ChatGPT 4o – DALL-E (version du 2 février) [grand modèle multimodal]. https://chatgpt.com

[1] https://horizons.service.canada.ca/fr/2024/perturbations/index.shtml

Livre blanc : Science participative et mobilisation des citoyens (Citizen Science)

Citizen-science-definition-Socientize-white-paper-2014

Après la publication du livre vert sur la science citoyenne à l’été 2014 CAPS 2014 – P2PValue et Socientize, voici que l’organisme Socientize publie le livre blanc Whitepaper of Citizen Science in Europe.

The White Paper on Citizen Science in Europe aims to support policy makers on European, national and regional level when setting up future strategies of civic engagement in the excellence in science.

Socientize-logo

L’objectif était de fédérer des contributions de plusieurs acteurs de plusieurs secteurs  :

  • open science
  • students curricula
  • sustainability models
  • incentives and motivation
  • data science
  • sharing knowledge
  • collective intelligence
  • social bussiness responsability
  • advanced training
  • e-infrastructures

Résultat, un livre blanc avec plusieurs bonnes idées autant au niveau macro. meso que micro.

Finalement, voici 2 schémas qui m’ont inspiré :

Les citoyens et la recherche.

citizens-are-research-Socientize-white-paper-2014

et celui-ci :

Des modèles pour la mobilisation des citoyens dans la science.

model-of-citizen-engagement-in-science-Socientize-white-paper-2014

 

La participation citoyenne doit nécessairement être connectée avec les sciences, dont les sciences sociales numériques (Digitals Humanities). Nous entrons dans une science de 3e phase La rencontre de la Science de Troisième phase et du Design Communautique. D’ailleurs, le livre Design communautique appliqué aux systèmes sociaux numériques (2014) de M. Pierre-Léonard Harvey est un bon pas dans cette direction.

 

Un Québec numérique c’est… une politique, un responsable et un plan d’action

Depuis quelques semaines, je constate une autre vague d’initiatives et de propositions d’actions concernant l’importance de mettre le gouvernement du Québec à l’ère des technologies et des usages numériques. La dernière en liste est la création en septembre 2012 d’un Groupe de travail bénévole pour un Plan numérique pour le Québec initié par Jean-François Gauthier et Claude Malaison. Le billet de Mario Asselin, un des membres du groupe, présente bien les moments forts de cet effort qui se remobilise sous diverses formes depuis 2007.

Aujourd’hui, plus que jamais, je pense que la vaste majorité des acteurs concernés sont prêts à se mettre en mode action, il ne manque que la volonté politique de prendre le train. Le contexte mondial (crises économiques, turbulences financières et énergétiques, chute de l’occident, etc. ) conjuguer aux considérations locales (démographie, finance, productivité, emploi, intégration des immigrants, etc.) sonnent le glas au statu quo et à la non-action.

Pour y arriver et être pratico-pratique, voici trois choses à faire, soit : élaborer une politique numérique, désigner un responsable du numérique au Québec et co-créer un plan d’action numérique.

 1- Élaborer une politique numérique

Je crois que le débat n’est plus sur la nécessité de créer ou non une politique. Nous avons un retard certain sur une multitude d’autres pays et de villes du monde qui sont déjà dans le train (des TGV) de l’économie et de la société numérique. Nous avons aussi un retard sur nos propres citoyens qui sont déjà actifs au niveau des usages numériques. Nous sommes une société grandement connectée mais avec des organisations (public, privé, communautaire, etc.) grandement en retard. Je pense que ce serait assez simple pour nous de partir des meilleurs exemples et d’en faire une version aux couleurs du Québec pour qu’elle soit près de nos visions, de nos spécificités, de nos intérêts, et de nos forces et faiblesses.

Voici une liste d’élément à considérer comme point de départ :

Bien entendu, nous aurons avantage à être aligné sur les grandes visées internationales au niveau du développement et des transformations numériques. Partant du Sommet mondial sur la société de l’information (2003-2005) jusqu’au WCIT 2012 qui aura lieu à Montréal du 22 au 24 octobre prochain avec un Plan d’action pour une société numérique mondiale, il nous faut être en cohérence avec nous-mêmes et les autres.

Une fois la politique élaborée, il faudra bien entendu définir un premier plan d’action et apporter des investissements significatifs pour être en mesure d’atteindre les objectifs.

2- Désigner un responsable du numérique

Afin de bien orienter les actions en lien avec une politique numérique, il faut qu’une personne soit en charge. Certains proposent un Ministre du numérique (À quand un ministre du numérique? de Nathalie Collard) et d’autres, comme Michel Dumais, sont plus orientés vers un Dirigeant principal de l’information (DPI). Le politique avant l’administratif, l’administratif avant le politique. Je crois à une forme d’amalgame des deux. Mais à mon avis, un ministre devient souhaitable et inévitable lorsque les acteurs du territoire, des villes, des régions, des organisations ancrées dans leur milieu, etc., ont déjà mis en branlent et réalisé une multitude de projets et d’initiatives autour du numérique comme c’est le cas en France. De là, la pertinence d’une Fleur Pellerin, Ministre déléguée PME, innovation, et économie numérique en France.

Mais ce débat est de deuxième importance puisque le plus important est de mettre les investissements au service de cette politique numérique du Québec. Une fois la structuration de la gouvernance et la sélection d’une personne dédiée à ce rôle de responsable, il est temps de créer le premier plan d’action.

3- Co-créer un plan d’action numérique 2013-2016

Il est important que le développement du premier plan d’action soit en mode concertation ouverte pour s’assurer de la mobilisation de l’ensemble des acteurs. Des initiatives et des transformations numériques, il y en a beaucoup au Québec et cela dans tous les secteurs de l’économie et de la vie citoyenne. Tous les secteurs sont concernés et touchés, les divers acteurs de ceux-ci doivent s’adapter qu’ils le veulent ou non. Ces initiatives sont souvent peu connues, mal soutenues et non-concertées. C’est pourquoi, il serait important et stratégique pour le Québec que le plan d’action numérique soit élaboré dans un mode d’innovation ouverte. Il faut intégrer dans le processus l’ensemble des parties prenantes de divers horizons qui ont déjà des projets, une expérience acquise, des antennes dans leur milieu. Il existe plusieurs stratégies (Ville intelligente, territoire numérique), méthodologies (Design participatif, Living Lab, Service Design) et outils de créativité et de participation ouverte (World Café, etc.).

En conclusion, selon moi, nos élus doivent pondre une politique numérique pour le Québec, ils doivent structurer une gouvernance et désigner une personne en charge du dossier et permettre la co-création d’un plan d’action numérique pour les prochaines années. Selon moi, le mot-clé, c’est la mobilisation. La mobilisation de l’ensemble des acteurs se fait par une volonté forte et démontrer d’aller de l’avant avec un Québec visionnaire et numérique.

Numériquement vôtre !